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Kouka : Du papier, du carton et de l’urgence

 

 

 

 

 

 

 

Après deux ans d’errance et de petits boulots, Kouka s’entend dire un jour lors d’un bilan de compétence : “Arrêtez de perdre du temps. Vous êtes artiste-peintre ?  Peignez !” Depuis, l’artiste se consacre corps et âme à sa passion : collage, peinture, expositions.

À Vitry-sur-Seine (94), cité Robespierre. L’oeuvre est saisissante. Immense. Un chaos qui gronde, prêt à jaillir. Quelles émotions si fortes ont donc porté l’artiste pour placer ici ce portrait ? La présence du peintre est encore palpable : aplats denses, traits épais et coulures blanches qui viennent donner vie à un visage tendu, presque brutal. Le personnage veille, le poing serré sur un bâton. Une lance ? Mais sur qui veille-t-il ? Pas d’indice. Rien n’est dit.

 

Kouka est peintre. Issue de la peinture de rue, exposant en galerie, revenant à la rue. Un va-et-vient perpétuel porté par le besoin d’être visible et la conviction intime que la peinture peut changer des vies.

La sienne d’abord, lui qui a été repéré par Nadège Buffe, propriétaire de la New Heart City gallery à Paris, lieu de sa prochaine expo.  “Je veux vivre de ma peinture et l’entrée en galerie est une vraie opportunité. Mais je n’y suis pas encore tout à fait à l’aise. Paradoxalement, je dois trouver l’équilibre entre exprimer ce que j’ai en moi, ce qui me pousse à peindre et, en même temps, plaire à des clients potentiels”, dit-il de sa voix tranquille.

De taille moyenne, tout est pourtant grand chez ce jeune peintre : ses locks, longs brins de cheveux, qu’il a noués, lui font un chignon en étoile, qui dégage un visage en triangle. Le sourire est discret mais amusé. Un léger zézaiement fait vibrer ses mots. Sous des sourcils arqués, ses yeux noirs en amande sont attentifs comme ceux d’un photographe. Il est solide sur ses jambes : des restes de sa vie de skateur.

Kouka, 31 ans aujourd’hui, a toujours baigné dans l’univers des arts et de la création. Une mère française, comédienne de théâtre, un père congolais danseur et musicien, un grand-père peintre. Diplômé des Beaux-arts d’Avignon, il vit aujourd’hui à Paris. Sa culture est urbaine : skate, rap, graff.

 L’inspiration

Son inspiration vient aussi de ses voyages. Des envies d’ailleurs déclenchés, souvent, par le départ forcé d’un atelier ou des attaches qui se rompent. “Après mon bac, j’ai participé pendant un mois à un projet scénographique au Cameroun. On devait construire un théâtre et monté un spectacle. Mais on avait rien. J’ai dû me débrouiller. C’est là-bas que j’ai découvert la récup’. Ça a été une révélation. Je rendais vie à des objets jetés, oubliés.” S’inspire-t-il du mouvement italien Arte Povera ? “Pas tout à fait. A la différence de ce mouvement,  je récupère des objets pour en faire des nouveaux supports, pas pour les placer au centre de mes créations. Je trouve intéressant de faire durer un matériau dont personne ne veut.

Un principe devenu sa marque de fabrique. Fuyant tout académisme, il tient à distance les fournitures trop nobles. “Elles m’intimident. Je les trouve trop sacralisés et figés dans l’esprit du public. J’ai toujours peint avec ce que je trouvais : journaux, cartons, pots de peinture de chantier, palettes, portes, affiches, murs…” Ce choix préserve l’urgence et la spontanéité de son geste. Son expression artistique reste libre. “L’oeuvre peinte sur un support pauvre gagne en beauté” conclue-t-il.

A découvrir

Son expo collective avec Haut en Couleur (HEC) : du 19 au 30 octobre 2012 à Frichez-nous la paix, 22bis rue Denoyez Paris-Belleville,www.lafriche.fr

Une autre expo plus personnelle : à partir du 15 novembre 2012 à New Heart City Gallery, 10 rue de Picardie, Paris 3è, 01 44 78 23 68, www.djtfa-paris.com

– Un livre : Kouka, guerrier bantu, Philippe Ruchmann, coll. Opus Délits, n°21, 10 €  et son disque : L’Enfant Blam

Petit extrait :

Et découvrir son blog

Et vous que pensez-vous du style du street artiste Kouka ?

Article & Interview de Jean-Philippe Trigla