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Découverte du Codex Urbanus

Le Codex Urbanus est un travail urbain qui fait écho aux anciens codex médiévaux ou aztèques. Codex Urbanus libère ses animaux hybrides sortis tout droit d’une encyclopédie. Des spécimens sont ainsi lachés dans la nature parisienne depuis plusieurs années. Rencontre avec le créateur du Codex, qui est actuellement en exposition au Cabinet Amateur.

Bonjour, peux-tu te présenter et présenter quelques-unes de tes créations ?

Le Codex Urbanus est un travail urbain qui fait écho aux anciens codex médiévaux ou aztèques; ce sont des manuscrits illustrés, mais celui-ci a la particularité d’avoir des pages de pierre ou de béton. Je trace donc, de manière nocturne et rupestre, des chimères sur les murs, à la façon d’un moine naturaliste. Par exemple, on peut encore voir l’étrange Dermochelis Eliphas (l’Eléphantortue) de la rue Planquette ou les deux spécimens rares d’hyménoptères sur la devanture du restaurant la Guêpe, rue des 3 frères. Il y a aussi 3 fresques à la bombe scellés dans le 3eme sous-sol du squat artistique Le Bloc à la Mouzaïa, mais ça c’est pour les archéologues des années futures…

Comment définirais-tu le style des Codex Urbanus  ?

Libre est le premier adjectif. Il faut que je sois assez pointu pour définir graphiquement l’animal, mais je dois être rapide et furtif, donc je ne peux pas me permettre de rentrer dans le détail comme un dessinateur du Museum d’Histoire Naturelle… C’est donc du dessin figuratif encyclopédique urbain.

Quelles sont tes sources d’inspirations ? Artistiques et Personnelles ?

Il y a bien sûr pas mal de géants de la Renaissance, comme Jerôme Bosch ou Léonard de Vinci (qui a aussi son Codex d’ailleurs). Dans une certaine mesure, il y a un aspect surréaliste aussi. Et puis je me sens appartenir à une famille de street artistes qui m’inspire et qui me pousse dans ce sens, notamment ROA ou BONOM, ou encore Never2501. J’espère bien un jour pouvoir faire des murs entiers, comme eux…

Fresque de Never2501

Quelles sont tes techniques et astuces pour produire tes animaux ?

Au début je travaillais sur des carreaux de céramique, les pages de porcelaine du Codex, mais elles étaient volées dans la semaine, et en général avec une partie du mur sur lequel elles étaient collées. Je suis donc passé au dessin direct sur le mur. Je fais le gris moi même, pour le noir et le blanc, c’est du marqueur classique. Je les ai toujours avec moi, comme ça, quand je sors d’une soirée et que je suis inspiré, je taquine un peu le crépi avant de rentrer chez moi…

Codex Urbanus sur céramique by 1wall2another

Comment t’es tu décidé à les coller dans la rue ?

Le collage m’est venu assez naturellement, en voyant son explosion dans mon quartier, à Montmartre. Mais je ne voulais pas que ce soit seulement de l’affichage, et j’ai un paradigme personnel qui est que si je vais squatter un mur, ça ne peut être qu’avec une pièce unique. Ephémère. Offerte définitivement à la communauté. Le Codex de Porcelaine me semblait parfait pour ça; il a été victime de son succès, mais il en reste encore deux sur les murs de Montmartre (et à Etel en Bretagne). Du coup, j’ai arrêté le collage, je suis devenu un vandale. Même si bien évidemment je n’ai pas l’impression de dégrader…

Quel est l’objectif de tes oeuvres ?

Le premier objectif est sans nul doute d’offrir un peu de rêve au gens, et d’embellir des murs moches (je ne peins jamais sur de la pierre de taille par exemple). J’aime voir l’interaction des gens avec mes animaux, les voir prendre des photos… Le second serait de constituer un bestiaire cohérent et permanent à Paris, mais c’est un travail de tout les jours, beaucoup de spécimens disparaissent très vite aussi sous la peinture municipale. Il y a en moyenne une 20aine de Codex à voir dans Paris toute l’année, mais ils changent vite…

Codex Urbanus

Que penses-tu de la scène street art à Paris et plus globalement, que penses-tu des artistes ? As-tu des coups de coeur ?

Je pense que la scène street art à Paris est digne des plus grands moment de l’Histoire de l’Art. Comme pour les impressionnistes, c’est une scène dense, émulatrice, où tous les acteurs se connaissent. Il y a les grands noms de la première génération, et toute une foule d’artistes qui bouillonnent dans différents endroits et sur différents supports. j’ai des tonnes de coups de coeur, que ce soit pour des artistes super connus comme Seyb, DacRuZ, Oré ou Ludo, que pour des talentueux nouveaux comme Djalouz, Rubbish Cube, Pole Ka, Bastek ou Kesa.

Et enfin as-tu une anecdote, un dernier mot à rajouter ?

J’en aurais plein… J’aime bien celle là: 3h du matin, aux Abbesses, je suis en train de donner vie à un Helix Octopus (un escarpieuvre), quand deux kids passent. Y’en a un qui dit à l’autre: « Hey regarde! un graffeur!« . L’autre s’approche et lui murmure: « houah nan c’est pas un graffeur… c’est un artiste!« . Comme dans le corbeau et le renard, j’ai été tellement flatté que j’en ai oublié les règles de base, et quand l’un des deux m’a demandé de lui prêter un Posca, je l’ai fait. Résultat: l’Helix Octopus c’est rapidement retrouvé encerclé de tags pourris sous mon oeil horrifié, et il a été effacé par la Mairie dans la semaine. Mais, c’était officiel, j’étais un artiste… 🙂

Helix Octopus

 

Merci beaucoup à Codex Urbanus pour cette interview pleine de bestiaires dignes du paléolithique… 🙂

N’oubliez pas Codex Urbanus est en exposition au cabinet amateur dans le cadre de l’exposition « Bestiarium Urbanus » du 21 mars au 7 avril 2013.