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Stoul, « peintresse » de la rue

Les Arromaches_Stoul

Dans les rues, l’art urbain se fait une place jusqu’aux galeries et aux livres. Dans cet art principalement masculin, certaines femmes, comme Stoul, savent tirer leurs pinceaux du jeu.

A l’abri dans son atelier de Montrouge, en région parisienne, entre son « matos », ses toiles et ses livres, Stoul peint. Elle sortira diplômée de l’école Boulle de Paris spécialisée dans l’ameublement (école supérieur d’Arts Appliqués). Grande admiratrice de Takashi Murakami, la jeune femme choisira la peinture. Avec le succès de ses toiles, son côté touche-à-tout, Stoul s’associe à divers projets. En janvier 2014, elle a participé à un événement à Montpellier, Home Street Home, tout en continuant de travailler sur ses bijoux, ses peintures. Réflexions d’une artiste hétéroclite.

Avez-vous toujours souhaité être artiste peintre ?
Très tôt, j’ai dit à ma mère que je voulais faire cette carrière. Les amis peintres de ma famille m’ont donné envie d’exercer ce métier. J’ai donc choisi l’école Boulle dont j’applique encore les méthodes et les techniques de travail. Après la première exposition de mes travaux, mes peintures ont eu beaucoup de succès ce qui m’a confortée dans mon choix.

Vos peintures sont reconnaissables aux femmes-chats. Pourquoi avoir humanisé cet animal ?
Au départ, je faisais des petits portraits de chats qui se déguisaient en humain. J’ai commencé ça vers dix-huit/vingt ans. Mon personnage a grandi en même temps que moi. Je me voyais plus femme, il devait me ressembler un peu plus.

Stoul

Vos femmes-chats sont très glamours, évoluent souvent dans un décor vintage. Quelles sont donc vos inspirations ?
Depuis longtemps, mon artiste préféré est Takashi Murakami et la diversité de son univers. Son côté « kawai » (mignon) m’inspire beaucoup. Je me retrouve dans sa façon de travailler : supports divers, nombreuses collaborations. Je m’intéresse aussi énormément à la mode féminine. Je regarde l’histoire des costumes, les différents créateurs même si j’adore Courrèges, Chanel, McQueen. Pour les poses de mes personnages, je prends des photos de mannequins dans des magazines de mode. Je mixe toutes ces tenues dans mes œuvres pour en créer de nouvelles.

Vous peignez sur des toiles, les murs, vous customisez des meubles…pourquoi cette diversité ?
Je pense que je ne peux pas oublier ma formation première. J’ai un grand attachement à l’objet utile. J’aime transformer les objets anciens que je récupère dans la rue ou les brocantes. J’interviens aussi sur des objets neufs lors de collaborations avec des marques. Ma technique est semblable : je leur donne une nouvelle vie. Concernant les murs, mon univers pictural s’étend à n’importe quel support. J’aime travailler sur des matières qui changent : le ciment, la brique, le métal que l’on trouve dans la rue. Je ne choisis pas forcément les lieux quand je travaille pour des commandes. Par contre, mes travaux personnels sont sur des terrains vagues ou des friches industrielles, à l’abri des regards.

Pourquoi « à l’abri des regards » ?
Quand c’est en terrain, c’est comme dans mon atelier, j’aime bien être seule, travailler tranquillement.

Stoul

Vous deviez pourtant être habituée à travailler sous le regard d’autres artistes au 59 Rivoli. Comment travaille-t-on dans des ateliers communs ?
En 2004, j’y ai passé un peu moins de trois mois. Au 59 Rivoli, on échange surtout des techniques, des petites astuces de travail avec des artistes professionnels de l’atelier. Franchement c’était plus un moyen d’avoir un lieu de travail. Ça ne m’a pas forcément fait connaitre. Je suis beaucoup mieux seule dans mon atelier.

Vous dites que vous aimez travailler seule cependant vous le faites en direct lors d’ateliers dans des expositions ou comme quand vous customisez dans des boutiques. Est-ce important pour vous d’échanger avec votre public ?
J’aime rencontrer des gens, discuter avec eux, connaitre leur avis sur mes œuvres. A certaines expositions, j’anime des ateliers où ils peuvent participer et apprendre des techniques de customisation, de peinture. Je souhaiterai reprendre un stagiaire pour m’assister mais surtout à qui je transmettrai mon savoir-faire et mes petites astuces.

Vous vous nommez « peintresse », vous touchez à tout et pourtant on vous connait plus pour votre Street Art. Que pensez-vous de ce statut, surtout en tant que femme ?
On a toujours besoin de mettre des gens dans des cases. Il se trouve que je rentre dans plusieurs dont celle du Street Art. Ça ne me dérange pas tant que je travaille, que je suis soutenue et que ça plait. Après ai-je véritablement ma place dedans ? Ce n’est pas à moi d’en juger, je m’en fiche un peu. En ce moment en France, les critiques, les organisateurs d’événements me reconnaissent, me sollicitent pour le Street Art. La place de la femme dans cet art urbain est la même que dans d’autres domaines. Certes les femmes sont minoritaires, je ne sais pas pourquoi, en tout cas à mon sens rien à voir avec le machisme. Le Street Art n’est pas fermé.

 

Article et interview réalisés par Marie-Ange Baudin pigiste.