Allier art et sciences est le pari tenté avec succès par le CEA de Saclay et l’artiste C215. Une collaboration fructueuse, qui permet de redonner des couleurs au cadre studieux d’un centre à la pointe de la recherche scientifique.
Peindre du street art sur un site aussi sécurisé que le CEA de Saclay tient de la gageure pour un artiste clandestin. Pourtant, c’est bien dans ce contexte de Vigipirate renforcé, que Christian Guémy, plus connu sous son nom d’artiste C215, a relevé le défi proposé par un de ses voisins vitriots, Jean Luc Sida, chercheur au CEA.
Albert Einstein – C215
Vu de l’extérieur, le site ne représente pas vraiment l’eden de l’artiste de rue. La présence de barbelés clôturant l’ensemble du terrain, situé entre les communes de Saclay, Villiers le Bacle et Saint Aubin, serait plutôt un frein à l’imaginaire artistique. Une fois infiltrées dans l’enceinte discrètement gardée, l’impression et l’expression sont toute autre. Allées larges, pelouse verdoyante, apparition spontanée de lapins donnent un côté champêtre à ce haut lieu de cogitation scientifique essonnien.
Max Planck – C215
Au fil de la ballade guidée offerte par le CEA, le visiteur comprend dorénavant pourquoi C215 a puisé une multitude de sources d’inspiration à l’intérieur de l’enceinte de cet immense laboratoire construit par l’architecte Auguste Perret, à qui l’on doit notamment la reconstruction du centre ville du Havre après la seconde guerre mondiale, à la fin des années quarante.
L’artiste s’est vite détourné du projet initial, dont les supports devaient être uniquement des instruments liés à la recherche scientifique, pour donner vie aux nombreux éléments urbains proposés par ce vaste alignement de bâtiments à la conception parfois étonnante, comme ce réfectoire très art moderne tout en baies vitrées.
David Bowie Space Oddity – C215
Si pour la plupart des fresques abordent des illustres scientifiques comme Pierre et Marie Curie, George Charpak, Henri Becquerel, ou Albert Einstein pour les plus célébres, l’imaginaire de l’artiste vagabonde sur des sujets plus fantaisistes comme la présence humoristique des principaux personnages de la saga Star Wars, ou encore Doc, le savant fou du film très eighties Retour vers le Futur, près d’un panneau signalétique de radioactivité.
Peter Higgs – C215
Si la réputation artistique de Christian Guémy s’est construite autour de ses portraits humains, il n’a pas résisté à la tentation de rajouter un bestiaire composé d’un lapin, dont les terriers pullulent sur les pelouses du site, d’un oiseau près d’une bonbonne d’azote liquide, et de son inévitable chat. Celui-ci étant astucieusement associé sur le battant d’une porte au physicien Ervin Schrödinger, afin d’illustrer sa fameuse expérience du « chat de Schrödinger », qui mettait en évidence le problème de mesure dans la physique quantique pendant les années 30.
Marie Curie – C215
A l’intérieur des bâtiments, on peut découvrir certaines réalisations de l’artiste sur des matériaux insolites fabriqués et recyclés par les scientifiques du CEA. Une expérience inédite pour un Street artiste, qui devrait se prolonger avec la réalisation en public d’une fresque sur un panneau miroir octogonal traité à l’occasion au CNAM, cet automne.
D’après Elisabeth De Lavergne, chargée de la communication du CEA, les réactions de l’ensemble des 8000 occupants du site sont globalement positives, même parfois surprenantes. Devant le succès remporté par ses visites confidentielles, le CEA rouvrira ses portes secrètes à l’exploration de ses oeuvres de Street Art en octobre prochain. Une manière originale de s’ouvrir à l’art et la science.
Jules Verne C215
Lise Meitner – C215
Articlé proposé par Rémi Chervier
Crédits photos CEA