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Rencontre avec Mitts – L’artiste qui transforme les rues d’Athènes en son propre terrain de jeu ! #1

Épisode 1 : À la découverte de l’univers de Mitts

En posant mes valises à Athènes, j’ai découvert que l’art urbain avait une place majeur dans l’histoire de la ville. Éveillant ma curiosité, j’ai pu découvrir de nombreuses œuvres d’artistes locaux dans le quartier d’Exarchia. L’un d’eux, connu sous le nom de Mitts, nous a ouvert les portes de son atelier le 31 janvier 2021. Nous lui avons posé des questions sur son parcours et sur les spécificités de l’art urbain dans la capitale Grecque. Sa compagne, Eliza, nous a aidées à traduire cette conversation du grec à l’anglais. À l’occasion de cette rencontre, Mitts a réalisé une œuvre en direct spécialement en français !

Mitts réalisant une œuvre pour Urban Art Paris

Hello Mitts, merci de nous accorder de ton temps. Peux-tu te présenter brièvement ? 

Je suis né à Athènes et j’ai grandi dans la banlieue sud proche de la mer, environ à 7/8 km d’ici. Je suis un calligraphe, un designer graphique, un street artiste, un illustrateur… Donc, je crée des mugs, des logos, etc. C’est mon travail. C’est comme ça que je vis. Tout est art et je crée à partir de rien.

Sinon, la principale chose que je fais, c’est écrire dans la rue des messages en grec. Ensuite, j’ajoute quelques décorations autour comme des étoiles, des bulles, des cœurs… À une époque, j’écrivais qu’un seul mot. On pouvait tomber sur le mot « profiterole » ou « combinaison ». Je fais des choses comme ça. Maintenant, j’écris beaucoup de « Kalimera » ce qui veut dire bonjour en grec. C’est comme une déclaration. J’écris aussi des citations. Je ne suis pas un activiste comme beaucoup de personnes le sont ici. Je me concentre sur des messages très positifs.

Eliza : Son art surprend les gens. Imaginez quelqu’un à Athènes qui revient du travail et qui a eu une dispute avec son boss. Quand d’un coup, il voit « Kalimera » écrit sur son chemin. C’est une grande surprise ! 

À l’époque, je travaillais beaucoup et tous les jours, je trouvais une carte avec écrit un message devant chez moi. Tous les jours ! Alors, je les accrochais et tous ceux qui me rendaient visite trouvaient ces messages très joyeux et colorés. Alors nous avons décidé de communiquer aux autres ces messages. C’est pourquoi, en 2016, nous avons créé le projet « Love postal volume 1 » et « Love postal volume 2 ». Il y a 100 cartes, 50 dans chaque boîte. On peut, notamment, les coller comme des stickers. À la base, ce n’était pas censé devenir quelque chose de commercial.

En plus, Dimitris croit en l’art bon marché. L’art que tout le monde peut se permettre d’avoir dans sa maison. Alors, tout le monde a beaucoup aimé ce projet « Love Postal », car habituellement, ce sont les filles qui écrivent des messages tendres. Maintenant, c’est le contraire ! Un garçon qui écrit pour une fille ces messages. C’était très sympa ! On s’est vraiment amusé en faisant ça.

Peux-tu nous expliquer le choix de ton pseudonyme ? Qu’est-ce que Mitts signifie ?

Mon vrai prénom est Dimitris. En fait, dans la langue grecque, Mits est un surnom pour Dimitris. Je voulais être un peu différent alors je l’ai écrit avec deux T. C’est une histoire simple ! D’ailleurs, quand on me croise dans la rue, tout le monde m’interpelle « Hey Mitts ! ».

Qu’est-ce qui a motivé ton choix d’étudier l’art et de devenir artiste ? 

J’ai toujours été un artiste, car je peins depuis mes 3 ans, et aujourd’hui, j’en ai 46 !

Eliza : Sa mère m’a dit qu’il n’allait jamais quelque part sans ses marqueurs ou ses crayons. Il a toujours été comme ça. D’ailleurs, quand je l’ai rencontré, je n’arrivais pas à comprendre pourquoi il avait toujours un carnet et un crayon à la main. Après quelque temps, j’ai compris qu’il créait en continu. En fait, il dessine toujours quelque chose. 

Pourrais-tu m’expliquer quelle technique tu utilises et en quoi ça consiste ? 

Principalement, j’utilise des craies, car ce matériel est en accord avec l’environnement. Ce n’est pas permanent donc après une pluie ça disparaît. S’il ne pleut pas ça reste environ 15 jours et en plein été ça peut durer un mois. Ça va aussi dépendre de la fréquentation de la rue, si les voitures roulent dessus. 

Craies utilisées par Mitts pour son œuvre « Bonjour ».

Mais je peux créer avec n’importe quel matériel que je trouve devant moi. Je n’ai pas de standard. C’est pourquoi, je peux utiliser de la peinture acrylique, comme des crayons, des craies, ça n’a pas d’importance. Comme vous avez pu le remarquer, il y a des oliviers dans la ville. Je peux prendre les olives et les utiliser comme de l’encre. J’ai aussi toujours mon marqueur sur moi, et des craies dans les environs. Je pense que c’est facile de créer à partir de rien. L’Art est partout ! J’ai déjà écrit un « Kalimera » au milieu d’ordures dans une poubelle. 

J’ai aussi créé des tampons avec l’intérieur de pneus de voitures. On pouvait en trouver beaucoup dans les poubelles. Donc, je les ramassais pour les transformer. Avec ces tampons, je les trempe dans l’encre et tamponne des cartes. Chaque carte est unique, car elle est faite à la main. 

Ton travail, a-t-il été influencé par certains artistes ? Mouvements ? Ou certaines cultures ? 

Je trouve mon inspiration sur les jaquettes de disques vinyles. Je suis collectionneur ! J’ai été très influencé par la culture psychédélique des années 60 en Californie et à San-Francisco. La musique Punk, c’est mon truc ! Bien sûr, je m’inspire aussi de livres de science-fiction, fantaisie, et comics. 

Pourquoi as-tu choisi de peindre dans la rue ? 

Tout ce que j’ai à l’intérieur, je veux le partager avec les autres. Je dessine dans la rue, car je pense que si des personnes passent à côté de mon travail, elles peuvent le remarquer. Je veux surprendre les gens qui marchent en regardant par terre. La seconde raison, c’est que tous les murs appartiennent à quelqu’un, mais la rue n’appartient à personne. C’est une chose publique, ce qui me permet donc de créer comme je le souhaite. Je ne dessine pas sur certains murs, car ils ne m’appartiennent pas. Ici, dans mon atelier, c’est mon mur, donc je vais pouvoir dessiner. Dans la rue, on peut seulement voir quelques-unes de mes œuvres au marqueur, mais les messages sont toujours positifs. « Kalimera », bien sûr, qui est son message principal et aussi des choses comme « La ville nous appartient ».

Comment choisis-tu la rue dans laquelle tu vas intervenir ? 

Il a deux critères. Le premier est que la rue doit être en bon état, car comme vous allez le voir après, je ne dessine pas, j’écris.

Eliza : Il a une relation très particulière avec la rue. C’est comme s’il pouvait entendre son cœur. Il agit de manière tendre comme s’il caressait une femme. Sa relation avec la rue est très personnelle. Il a d’ailleurs choisi dès le début de ne pas nuire à l’environnement. 

La deuxième raison est l’angle que je veux choisir pour prendre ma photo. Car les photos seront les seules traces qui resteront de mon travail une fois que tout sera détruit. Ces photos sont la seule preuve que quelqu’un, à ce moment-là, a fait quelque chose. 

Pourquoi as-tu choisi de peindre sur des boîtiers électriques ? 

Ces boîtes électriques s’appellent des Kafaos. Elles appartiennent à des entreprises de télécommunication. Pour cette raison, elles sont remplies de câbles électriques. C’est une vieille tradition ici à Athènes, on peut les voir partout. Elles sont normalement grises donc la plupart des gens collent des stickers, des posters et de la publicité dessus. 

Je veux les décorer et changer le sentiment que les gens ont quand ils regardent ces boîtes. En résumé, quelque chose de gris devient quelque chose de coloré avec un message positif. 

Les messages que j’écris sur les Kafaos veulent dire « Tomber amoureux », « Merci », « Bonjour »… Ce sont des messages de gratitude. Comme je vous l’ai dit avant, c’est ma façon d’être, je crée avec mes sentiments.

https://www.instagram.com/p/CLJoHE-gfNM/

Rendez-vous la semaine prochaine pour la suite de la rencontre avec Mitts ! Il nous fera découvrir la capitale grecque, Athènes, à travers son art urbain. Une ville ancienne et multiculturelle, mais aussi une ville difficile. 

Échange mené, traduit et retranscrit par Oksana Monteiro Peixoto.