Désormais coutumière des expositions dédiées au street art, la galerie DEUX6 (Paris 7e) consacre un mois et demi d’exposition à l’artiste Jules Viera. Résolument engagé, « témoin de son époque », artiste sans frontières, Jules Viera a choisi le néologisme « CRASHitalistes » pour titre de son exposition.
Serait-ce une manière de dire que du « capitalisme » au « crash » il n’y a qu’un pas ? Peut-être, mais pas seulement. D’abord parce que ce serait une idée servie sur un plateau, et que Jules préfère questionner qu’apporter des réponses. Ensuite parce que les œuvres, objectivement, traitent de crash et de capitalisme. Crash d’avions, de bateaux, impacts de balles, « étoile brisée »… Rien, ni personne, n’est à l’abri. Quant au capitalisme, c’est parce qu’il est question d’interroger nos modes (excessifs) de consommation et leurs dérives quotidiennes.
Le marché de l’art n’est pas en reste non plus, notamment lorsque le géant qu’est la FIAC se voit moqué dans l’œuvre Supermarket. Jules Viera a pris le parti de construire cette première exposition parisienne dédiée entièrement à son travail dans un esprit de collaboration avec la matière. Ou plutôt faudrait il dire les matières puisque le cuivre, le bois, les papiers (et bien d’autres) sont mis à contribution. Une multitude de technique est également mise au jour, et paradoxalement seule la traditionnelle toile ne trouve pas sa place dans cette exposition polymorphe. Loin des sentiers battus l’artiste tâche d’engendrer une réflexion qui prenne, elle aussi, plusieurs formes. C’est en ce sens, et à cette condition, qu’elle peut être libre et sans entraves. Teintée d’un cynisme assumé, « Crashitalistes » n’est pourtant pas une exposition qui laisse un souvenir obscur. Elle est de celles dont on se souvient, et ça tombe bien puisqu’elle est à voir jusqu’au 30 mars !
Le mot de Jules Viera :
« Nous voilà tous crashitalistes, acteurs et victimes d’un futur incertain, mais néanmoins responsables directs et indirects de l’héritage toxique que nous laissons aux générations suivantes. Les différentes pièces qui composent cette série de travaux sont principalement produites sur un support de mille-feuille de papier, inspiré et parfois même composé de ces grands pans de publicités qui s’effondrent sur les quais du métro parisien, pliant sous leur propre poids, symbole tragi-comique de notre société de consommation. Des lattes de lit se transforment en caisse américaine. Des planches de bois utilisées sur les chantiers pour soutenir les échafaudages se muent en stèle d’expression. Montés de A à Z à l’atelier, les travaux naissent dans l’esprit d’une translittération, composée de ciment, de bois et de briques sur lesquels dialoguent peintures à l’huile et acrylique, transfert d’impressions, sérigraphie, collage, encre de chine, résine d’epoxy et photographie. De la première couche de matière jusqu’au cadre, je souhaite transcrire une lecture polymorphe et personnelle de notre époque, choisissant des matières encore vivantes, chinées en brocante, ou récupérées sur des chantiers, dans le but de leur offrir une seconde vie, comme une pointe d’espoir lancée vers l’avenir. »
Infos pratiques :
Exposition jusqu’au 30 mars 2019.
Galerie DEUX6
66, avenue de la Bourdonnais
75007 – Paris
Ouvert du mardi au samedi de 11h à 19h.
Lou Belloy