Namasté, une nouvelle conception de l’acronyme VAO
Après avoir retracé l’histoire du crew VAO et ses différentes appellations avec L’Atlas, partons à la rencontre de Namasté et de son triptyque. Il nous propose de découvrir sa vision de l’acronyme, trois lettres et plusieurs variations. Visible à la galerie Ground Effect.
Hello Namasté ! Explique-nous ce triptyque.
Au départ, je voulais cartographier toute la nébuleuse de VAO. Cela aurait été un moyen de découvrir et comprendre tous les artistes qui la composent ainsi que leur parcours. Je connaissais la plupart des membres du crew, mais certains m’étaient totalement nouveau.
Mais je ne voulais pas faire rentrer dans des « cases » des artistes dont la peinture et la technique ont souvent beaucoup changé, en vingt ans. Alors j’ai fait ce travail pour moi et je ne l’ai pas montré pour cette expo.
Au début, j’ai eu du mal à canaliser toutes mes idées. C’est avant tout, l’abstraction inhérente à l’expo qui m’a poussé à faire simple. C’était un bon exercice. J’avais peu de temps et une déferlante d’idées, envisageables. C’est pourquoi, j’ai « abstrait » ma pratique en me forçant à sortir de mes zones de confort, qui sont le tag, le dessin et la courbe.
Pourquoi avoir fait des lettres sur cette toile ?
Je m’intéresse aux symboles, aux alphabets, aux manières de les écrire et à leurs impacts. Par ce triptyque, je voulais faire ressortir une lecture visuelle des lettres V.A et O, en tant que figure géométrique.
Déjà, les possibilités sont immenses ! Un triangle vers le bas, un autre vers le haut… Mais tout ce qui est en haut, est en bas… Le O est un cercle parfait, un zéro, symbole du vide, de l’origine…
Finalement, j’ai envisagé les lettres comme des objets à cartographier. Pour le V et le A, j’ai symbolisé deux compas. Pour le O, une horloge.
Si on s’en tient à la grille de lecture du V et du A, alors le O devrait être un X. Là où, l’initié au V.A.O, pourra déduire que le O est celui d’Origine, Optique ou encore Organisée.
Le « O » a cette particularité de rester lisible dans les quatre sens d’accrochages de la toile, formant un mini puzzle dans lequel les lettres peuvent être interverties.
« Les sens de lecture sont ainsi multiples, comme un ensemble à géométrie variable, à l’image du collectif VAO. »
Trois toiles, mais aussi trois lieux d’expositions ?
En me concentrant sur les trois lettres VAO, l’idée du triptyque s’est un peu imposée d’elle-même.
Les expositions de Montpellier et Bruxelles, sont l’occasion d’adapter les trois lettres au contexte et de les former dans un autre esprit.
Trois triptyque VAO et neuf toiles. C’est l’objectif de cette première série. Et je suis honoré de participer à l’aventure.
La toile n’est pas ton support de prédilection. Comment est-ce que tu t’y es pris pour les réaliser ?
C’est vrai que je peins assez peu de toiles. Il y a un an, à l’occasion de l’exposition « Trois Générations du graffeurs » avec Psyckoze et Nascio, j’ai pu renouer avec ce support.
Cet été, L’Atlas m’a parlé de l’expo VAO & Friends et l’idée m’a directement emballé ! Lorsque j’ai commencé ces toiles, j’avais quelques semaines pour les faire et comme dit plus haut, beaucoup d’idées en tête.
Je n’ai pas d’atelier. Pour ces toiles, j’ai travaillé en bas de chez moi, dans mon quartier. Un coin un peu sale mais à l’abri du vent, avec pour spectateur un scooter désossé, dépérissant. Une fois mes scotchs posés, j’ai fait des premiers tests au spray.
Deux jours avant de déposer mes toiles à la galerie, je suis passé avec ces dernières au VAO Studio. À mes yeux, il manquait quelque chose à ma proposition du tag, du flow, une indication de lecture… J’ai montré à Tanc et à Zoner mon travail en cours, en leur exposant mes théories fantasques de calques à manipuler, un moyen d’interagir avec l’œuvre. Ils m’ont conseillé de rester sur un travail abstrait et minimaliste. L’idée m’a rapidement convaincu.
« Sur ces toiles, je donne vie et corps aux lettres avec une épaisse couche d’acrylique, formant un aspect strié. »
Je joue aussi des imperfections, notamment dans la pente ascendante du A où j’ai glissé un coup de cutter.
J’ai choisi de les assumer et d’en faire jaillir une légère aura blanche. Là où, sur l’autre versant, une tache noire semble déséquilibrer l’ensemble.
Qu’est ce que tu as voulu ajouter ou préciser dans ces toiles ?
Le V représente une pyramide renversée, symbole du tag illégal et spontané. Semblable à un pur produit de son environnement.
Le A, est plutôt comme une montagne. Celle de l’accomplissement artistique. C’est la reconnaissance culturelle, muséale et les paliers qui la composent.
Dans cette approche, L’Atlas serait en quelque sorte en haut du A, et moi au bas du V. Mais rien n’est fixé et l’ensemble s’harmonise dans le O formant un grand cycle, en mouvement depuis 25 ans.
D’ailleurs une série de 25 définitions VAO, tagués à l’encre sur papier a également été réalisé pour accompagner ce triptyque mystique (rires).
Merci pour toutes ces précisions ! Dans cette expo, est-ce que tu t’es fixé un objectif ?
Si j’arrive à interroger le spectateur et l’artiste sur les besoins d’un rendu parfait, c’est déjà beaucoup ! Sinon, l’essentiel est de donner de l’amour et du sens au travail, et ce, au-delà de la technique.
Je me suis ensuite concentré sur les titres. Ils sont là pour aiguiller, pour que chacun interprète la proposition, avec sa sensibilité.
Que signifie donc ce nouvel acronyme ?
« Le V est un double V pour le Vandalisme Vernaculaire. »
Le Vandale, la transgression et le dépassement de soi, sont les abysses personnels et insondables du graffiti. Puis, quelque chose de vernaculaire prend sens dans le lieu où il est fait. Mon approche du tag est vernaculaire puisque c’est Paris et sa banlieue qui nourrissent ma démarche. En explorant la ville, on plonge aussi dans ses profondeurs.
« Le A, signifie Accomplissement Artistique. »
Dans le A, il y a deux fines bandes sur les côtés qui montent et qui descendent. Elles représentent ces nombreux allers-retours de l’ombre à la lumière, de la liberté à la commande, de l’illégal à l’institutionnel. Ce A, représente l’équilibre instable entre l’artiste et le tageur. Autant de paliers à franchir pour s’épanouir artistiquement.
« Le O, pour Origine Occultée. »
Outre le fait que je pense que nos origines sont occultées dans l’histoire de l’humanité. L’artiste, le graffeur, réécrit lui aussi son histoire, comme un mythe, et se renouvelle cycliquement. C’est la résultante d’un travail dans la rue. La galerie est incarnée ici par un V / A. Ce O, en forme de X représente l’équilibre des forces.
L’occultisme est une discipline qui me fascine. Donner un sens caché et sacré à cette toile, un support modeste, me semblait important. Ce triptyque est une pionnière d’une série qui pourrait s’avérer longue.
Ici, l’approche géométrique rend hommage à l’esthétique VAO-lignes, aux points, et au contraste texture, que j’admire.
Pour « résoudre » le message de la toile, il conviendrait de superposer les trois tracés afin de mettre en relation les énergies qui s’y rencontrent au centre du O (de Origine).
En quelque sorte, V+A=O. Comme un Totem, une monade.
Trois Trinités :
Amour, Connaissance, Vie
Harmonie Nina Namasté
L’esprit, Corps et l’Âme.
« J’ai donné beaucoup d’amour à ces toiles. C’est un hommage à l’approche sans concession, l’optique et à l’esthétisme de VAO. »
Pour le prochaine épisode nous partirons discuter avec Aleteïa et ZOO, des discussions entre nouveauté et hybridation.